Étymologiquement, Malherbe est un mot créé par l’agglutination des mots « mal » et « herbe », signifiant donc « mauvaise herbe ». Un nom prédestiné pour le poète, finalement moins pour un club de football.
Le Stade de la Mauvaise Herbe de Caen annonçait donc la couleur, imposant son hégémonie sur les champs de patates de Normandie sans toutefois jamais réussir à essaimer au plus haut niveau, sur des terrains moins fertiles, plus hostiles. Montées, descentes, succès, débandades, poutrages, putsch, place du con, quatrième, dix-huitième, l’histoire du club est une liste à la Pré(pas toujours)vert. C’est la triste banalité du Malherbe : toujours vert, jamais mûr. On le croyait devenu bon vin, Angevin même, et s’en va l’actionnaire, et s’en va l’entraîneur, et s’en revient l’idée que, peut-être, la pelouse est plus verte ailleurs.
Ses espoirs de montée tout comme son budget bien tondus, Malherbe doit trouver un nouveau jardinier qui saura l’accepter, le cultiver et le protéger du glyphosate de marque DNCG. Dans le football français, Malherbe, c’est la biodiversité, le droit à la différence, de ne pas produire les plus belles fleurs ou les brins les plus accueillants, de se planter à nouveau sur le même terrain, mais aussi là où l’on ne l’attend pas. Malherbe, ce n’est en effet pas l’herbe plus verte ailleurs mais celle que l’on trouve chez soi, chez son voisin, dans les parcs. C’est la mauvaise herbe anonyme, moyenne, lambda, qui ne se prend pas pour un billard mais que l’on apprécie de retrouver pour ce qu’elle est : accueillante, un peu grasse, parfois éparse. Malherbe, c’est la mauvaise herbe banale de tous les jours. Celle qui nous fait vivre, respirer.
Attention cependant. We are Malherbe, nous sommes de la mauvaise herbe, tous, mais gare au malherbicide ! Gare à la mauvaise herbe transportée sous de méchantes bottes sous lesquelles, sans reconnaissance de notre part, disparaît notre banalité. Au vent mauvais (souffle vers l’haine), la feuille (ou le brin d’herbe) morte est toujours emportée vers le même côté. Quelque chose a cloché dans la ville aux cents clochers sur laquelle a flotté l’odeur de l’indécence. Simple. Basique. Les actionnaires passent, les dirigeants passent, les joueurs passent, même les employés passent, mais nous restons. Soyons vigilants à ce que la banalité du Malherbe ne soit pas en réalité le résultat de la somme de nos petits abandons quotidiens.