La tentative avortée de 1962
Ouest France, 17 mars 1962
Au début de l’année 1962, la question du professionnalisme au stade Malherbe refait surface. Des dirigeants du club distillent dans la presse locale leurs intentions de remonter une équipe professionnelle de football dans la ville alors que l’équipe première joue en championnat de France amateur (CFA), le plus haut niveau amateur. Mais l’équipe peine en championnat et se retrouve très vite aux dernières places. C’est alors que germe dans la tête des dirigeants du club l’idée de reformer une équipe professionnelle.
La question arrive au conseil municipal pour la première fois lors de la séance du 29 janvier 1962 où l’adjoint chargé de la jeunesse et des sports – Jean-Marie Girault – répond qu’il ne connaît cette affaire que par les échos recueillis dans les journaux et qu’il n’a eu aucun contact avec les dirigeants du stade Malherbe. C’est le président du club Robert Verger qui prend contact avec la mairie au début du mois de février 1962 avec un projet déjà bien ficelé. Il est basé sur l’expérience de l’AS Cherbourg qui est passée pro en 1961 en rachetant les joueurs de l’équipe du FC Sète. Il prévoit un budget initial de 4,2 millions de francs pour acheter cinq joueurs professionnels et un entraîneur (2 millions fournis par un groupe privé, 500 000 par une souscription publique, 1,5 million par un prêt bancaire et 200 000 par une subvention du conseil général). Pour le budget de fonctionnement, il est prévu 4 millions de dépenses annuelles pour 2,7 millions de recette (guichets avec une moyenne estimée à 3 000 spectateurs et publicités) et donc un déficit de 1,3 millions. C’est là que la mairie intervient dans le projet des dirigeants caennais : le déficit serait comblé par la mairie !
La question est étudiée lors du conseil municipal du 16 mars 1962. C’est Jean-Marie
Girault qui fait l’exposé du projet ou plutôt d’un contre-projet. Car la commission des finances et celle des sports ont décidé d’emblée de ne pas laisser une chance au projet d’équipe professionnelle. Elles se basent sur l’expérience qui se déroule en même temps à Cherbourg depuis la saison 1960/1961. Cette équipe a débuté avec de gros moyens afin de racheter l’effectif du FC Sète qui abandonnait le professionnalisme. Elles s’alarment des surcoûts qu’entraîneraient de mauvais résultats (baisse des recettes guichet, difficulté de remboursement des prêts bancaires) dans un contexte global où les clubs de première
et de deuxième division cumulent un déficit de 13 millions. Outre le grief financier, les commissions reprochent aux dirigeants d’avoir pris la décision de créer une section professionnelle sans qu’une assemblée générale du club ne se soit réunie. Les commissions proposent donc au conseil municipal de ne pas financer le projet d’équipe professionnelle mais que, en compensation, la subvention annuelle soit rehaussée. La proposition est adoptée par 25 voix contre 6 et 1 abstention.
Suite à cette décision, le comité directeur du club se réunit le 23 mars pour prendre acte de la décision municipale. Dans un long communiqué, les dirigeants répondent aux griefs exprimés par Jean-Marie Girault et s’étonnent que les conseillers municipaux n’aient pas pu voter le projet présenté mais seulement un contre-projet d’aide à l’équipe première en division d’honneur (car il était acté que l’équipe allait descendre au vu des résultats). Pour protester contre la décision municipale, le comité directeur dans son ensemble démissionne afin de convoquer une assemblée générale extraordinaire. Lors de celle-ci, tous les démissionnaires retrouvent leur place mais c’est Joseph Grégoire qui retrouve provisoirement la présidence du club pour une année. L’équipe première ne végète qu’un an en division d’honneur et remonte immédiatement en CFA jusqu’au début des années 70.
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